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Les Ets Pissier : des projets plein la tête

La complémentarité des caractères de Matthieu et d'Antoine Pissier leur permet d'enrichir leurs décisions. Pour eux, cette direction bicéphale est un atout.Gonzague Defois

Depuis dix ans, Antoine et Matthieu Pissier pilotent l'entreprise familiale. En cinq ans, le chiffre d'affaires a doublé, notamment grâce à une diversification vers des marchés de niche.

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«Devenir une entreprise représentative en région Centre », voici l'objectif fixé par les frères Pissier pour conduire leur négoce agricole. Dix ans après avoir intégré l'entreprise familiale, les résultats sont au rendez-vous : la collecte annuelle dépasse les 100 000 t depuis plusieurs années, et le chiffre d'affaires a doublé en cinq ans. Pour en arriver là, les dirigeants ont misé sur une structure familiale légère et sur des diversifications vers des marchés de niche.

Tout a commencé en 1944, lorsque Marcel Pissier reprend un petit commerce de grains à Ouzouer-le-Marché, en Loir-et-Cher. Il commercialise alors 300 t de céréales en sacs. Rapidement, les capacités de stockage augmentent jusqu'à 40 000 t en 2012. La collecte suit la même évolution. En soixante-dix ans, l'entreprise familiale connaît trois générations. D'abord, Marcel, qui la transmet à Michel, qui la confie à son tour à ses deux fils : Matthieu et Antoine.

L'humain au coeur de l'entreprise

« Les mauvaises langues diront qu'une direction bicéphale est difficile à gérer. Pour nous, notre différence est un réel atout. A chaque fois que nous prenons une décision, nous confrontons nos points de vue. Cela enrichit notre entreprise », explique Antoine. Matthieu ajoute : « En dix ans de collaboration, nous n'avons pas eu de conflit. Jamais, je n'y aurais cru... »

Matthieu, diplômé d'une école de commerce, et Antoine, ingénieur agricole, se partagent les commandes du groupe Pissier : le premier s'occupe des approvisionnements, le second de la commercialisation des céréales et de la gestion générale de l'entreprise.

Pour les deux frères, l'évolution de l'entreprise passe par les hommes. « Nous sommes réellement proches de nos clients agriculteurs grâce à la présence sur le terrain de nos dix technico-commerciaux et par notre disponibilité. Ma porte est toujours ouverte pour discuter avec nos clients », insiste Matthieu.

Le nombre de salariés est passé de 25 à 40 en dix ans. Actuellement, les Ets Pissier recherchent un à deux commerciaux en grandes cultures, ainsi qu'un responsable entretien. « Nous souhaitons surtout une croissance régulière, qui ne mette pas en péril l'entreprise », commente Antoine.

Des céréales de qualité et de masse

Habituellement, dans une structure familiale, le chef d'entreprise doit être polyvalent. Chez les Pissier, il en est de même, mais chaque poste est doublé. « Pour plus de professionnalisme, nous avons un responsable par dossier, et un suppléant. C'est trop dangereux de ne miser que sur une personne. Concrètement, au moins deux personnes savent piloter chaque silo », ajoute Antoine. Grâce à cette organisation, les frères Pissier s'engagent dans des mandats professionnels et prennent de la hauteur vis-à-vis de leur métier. Matthieu est le référent négoce pour le réseau régional d'épidémiosurveillance et est membre de différentes commissions chez Agridis. Antoine, quant à lui, est administrateur de la Fédération nationale du négoce agricole (FNA) et la représente au Coceral, l'instance européenne des négociants.

Pour assurer la pérennité de l'entreprise, la famille Pissier perpétue son métier : le négoce de céréales. Les frères commercialisent des produits de qualité, comme les blés durs, les blés améliorants ou les orges de brasserie qui demandent un allotement, auxquels s'ajoutent des produits de masse : blé tendre, colza, maïs... Ils sont en concurrence avec les coopératives et les négoces du secteur (Axéréal, Soufflet, Leplâtre...), mais aussi avec des courtiers, comme l'explique Antoine Pissier : « Dans la région Centre, plus de 90 % des agriculteurs stockent leur récolte. La vente en circuit court ferme-usine se développe énormément depuis cinq à six ans. Nous avons diversifié nos offres avec le direct ferme notamment. Il s'agit d'éviter le passage silo, avec les risques de refus assumés par l'expéditeur. Nous avons créé un poste de responsable collecte pour assurer une veille sur le marché et conseiller nos clients. »

Chaque jour, Franck Pasquier, le responsable collecte, ou Antoine Pissier, propose une analyse du marché, très synthétique sur le site internet de l'entreprise, ainsi que les cotations au fil de l'eau, selon les variations incessantes des cours. La clientèle industrielle de la SA Pissier est diversifiée : meuniers, fabricants d'aliments de bétail, semouliers, malteurs... et quelques exportateurs. Ce qui lui permet de proposer de nombreuses offres d'achats à ses clients avec des prix moyens, des prix fermes, des prix encadrés, des prix d'objectifs... Parallèlement, pour se démarquer des autres organismes stockeurs, l'entreprise a choisi la diversification. Depuis dix ans, le négociant s'est lancé dans l'oisellerie. Il commercialise des graines de millet, de tournesol strié, de maïs ou de pois verts aux opérateurs européens (Espagne, Portugal, Belgique, Pays-Bas, Grande-Bretagne). Cette activité demande une grande régularité dans la qualité et des investissements importants.

Une implantation en Sologne

En ce qui concerne les intrants, les Ets Pissier travaillent avec Agridis, un réseau national basé à 40 km d'Ouzouer-le-Marché, à Fossé, à côté de Blois. « Cette proximité nous permet d'avoir une grande réactivité sur les produits, sans augmenter les capacités de stockage », souligne Matthieu. L'entreprise se diversifie aussi dans le secteur des approvisionnements avec un technicien référent en pommes de terre. Elle propose, notamment, le traitement des plants de pommes de terre, avec l'Oscar système.

Autre secteur développé depuis sept ans, les espaces verts. Il s'agit de fournir les collectivités, les paysagistes ou bien les châteaux en produits phytosanitaires, en terreaux, ou en semences de gazon. Cette nouvelle activité s'est développée fortement, plus 300 % en cinq ans. « Nous ne cherchons pas à gagner des parts de marché par le prix, mais par les services et la qualité de nos produits. C'est une stratégie lente, mais pérenne », souligne Matthieu. La branche espaces verts représente 10 % du chiffre d'affaires des approvisionnements. En 2011, les frères Pissier ont conforté cette activité en développant des produits pour les horticulteurs et les pépiniéristes. Ils proposent, dorénavant, une gamme de substrats et de poteries. Les Ets Pissier ont agrandi leur zone, en rachetant en 2001, l'entreprise Barbary, un négociant agricole implanté au sud du Loir-et-Cher. En pleine Sologne, Barbary collecte des céréales, propose des intrants. Néanmoins, son activité principale est orientée autour de la chasse : agrainage, cultures à gibier, couverts faune sauvage... Les dirigeants ont investi un million d'euros en cinq ans pour moderniser le silo et le parc de transport. En quelques années, le chiffre d'affaires a doublé, il est passé de 2,4 à 4,8 M€. Toujours proactifs, les frères Pissier proposent depuis janvier 2012 une activité d'aménagement du territoire et fournissent des barrières, des miradors, des pièges, etc.

Se diversifier « sans s'éparpiller »

« Nous nous diversifions, mais sans nous éparpiller d'un pivot central : l'amont et l'aval de l'agriculture. Nous essayons d'ouvrir notre métier. Nous organisons des conférences, nous visitons des entreprises agroalimentaires avec nos clients, nous participons aux Assises du fleurissement, etc. Nous sommes toujours en alerte sur les nouveaux métiers. Nous essayons de proposer du neuf tous les ans à nos clients, en anticipant leurs besoins », détaille Antoine Pissier.

Pour 2013, les projets ne manquent pas : développer un site extranet en horticulture-pépinière, lancer un logiciel d'enregistrement des pratiques parcellaires sur internet en collaboration avec Agridis, agrandir le stockage en horticulture, etc. Les investissements humains et matériels restent le moteur de la croissance. Les frères Pissier ne comptent pas déroger à cet état d'esprit !

Aude Richard

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